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20. Caserne abandonnée

La République des enfants - Travelling

La République des enfants – Travelling

N’ayant pu faire le plein la veille en l’absence du bon d’essence, c’est un peu avant six heures que nous quittons le CCFM pour une halte à la station Total flambant neuve sur 25 de Setembro.

Bien que trois à quatre fois moins chère qu’en France, l’essence reste une denrée de luxe dans ce pays qui a connu des émeutes meurtrières en 2008 lorsque le gouvernement avait voulu en augmenter le prix. A cette époque, devant la pression de la rue, seul le diesel pour les minibus collectifs avait échappé à cette hausse.

Le bon d’essence signé, nous reprenons la route des plages.

Le décor du jour est encore plus loin sur cette piste que nous commençons à bien connaître. Après avoir dépassé la savane de la veille, nous continuons deux kilomètres dans des traces de plus en plus sableuses, où nous ne  croisons qu’une ou deux maisons isolées.

21. Champ de mines : progression

La République des enfants - Sur le champ de mines

La République des enfants – Sur le champ de mines

Nous avons deux jours pour réaliser la séquence 2 du film.

Après avoir quitté l’école en emmenant tous les enfants, quel que soit leur âge, le groupe de soldats et leur colonne d’otages arrivent dans une vaste zone désertique qui s’avère être possiblement un champ de mines.

En tête de colonne s’avance prudemment un des soldats les plus expérimentés, un pas en avant, arrêt, un autre pas, arrêt, à nouveau un pas, arrêt, encore un pas, arrêt, il avance avec une assurance indéfectible, même si chaque pas est une menace de mort.

Derrière lui, dans un ballet parfaitement réglé, chaque membre de la colonne en file indienne suit exactement le même rythme cadencé, en prenant soin de mettre précisément son pas dans la trace de celui qui le précède.

Quand le guide lève le pied droit, c’est toute la colonne qui lève le pied droit, quand il le pose, c’est toute la colonne qui le pose dans la marque précédente, quand il lève le pied gauche…

22. Champ de mines : explosions

La République des enfants - Waldemar et Gerhard

La République des enfants – Waldemar et Gerhard

Aujourd’hui nous allons en avoir plein les oreilles vue la quantité de poudre noire que Gerhard a mis hier dans les bourres.

Une grande journée d’effets spéciaux nous attend sur la piste de Chiango que nous prenons pour la dernière fois et qui mène au décor du champ de mines de la séquence 2 du film.

Mais auparavant, reprenons le fil de l’histoire où nous l’avions laissé hier.

Mon de Ferro, au mépris de tout danger, a remonté la colonne d’enfants, en dehors des marques, pour engueuler Fatima alors qu’elle donnait une banane à son bébé en pleurs.

C’est à ce moment là que Toni, en tête de colonne avec Tigre, annonce « Mine ! ». Mon de Ferro se précipite vers eux et leur ordonne d’avancer en les traitant de lâches puis s’en va courir au milieu des mines pour leur montrer à quel point il est invincible.

24. Les fruits du Potemkine

La République des enfants - Place du Palais

La République des enfants – Place du Palais

Depuis plusieurs jours, Flora évoquait l’idée d’une avalanche de fruits dévalant le grand escalier du Palais. Une allusion évidente au film d’Eisenstein, greffé du symbolisme d’une corne d’abondance qui se tarit.

Une idée en l’air qui deviendra défi puis réalité.

Mais revenons avant tout au début de la journée, continuation laborieuse des plans de la foule fuyant la ville sur la grande place au pied du Palais.

En ce dimanche matin, la Place de l’Indépendance, faisant face à l’Hôtel de Ville de Maputo, est à nouveau totalement bloquée pour les besoins du tournage.

Nous avons 80 figurants, des enfants, des adultes, des vieillards, des femmes portant bébé dans le dos, quelques charrettes et animaux, deux ou trois voitures ou minibus, c’est une Afrique moderne et traditionnelle, riche et pauvre qui se côtoie dans la panique, une foule qu’Angela, Dino et Cossa vont faire courir, tomber, pleurer, crier tout au long de cette matinée.

26. Pharmacie

La République des enfants - Circulation sur EN1

La République des enfants – Circulation sur EN1

Difficile d’être motivé après une  nuit de fièvre et de vertiges. Je prends la route  à reculons si je puis dire.

Au cours du trajet, nous apercevons une voiture blanche littéralement enroulée autour d’un arbre, en plein village.

C’est le premier accident que je vois dans ce pays et celui-là a dû être terrible.

Entre les minibus ou camions qui débouchent sans prévenir, les voitures qui doublent à des vitesses incroyables entre deux files, obligeant à se rabattre d’urgence sur le bas-côté, je suis surpris de ne pas en avoir vu plus.

Malgré ma forte envie d’arriver vite pour repartir encore plus vite, je lève un peu le pied et redouble de vigilance. Nous sommes partis un peu après Bob et avec la voiture puissante que la production nous a louée, je pourrais être tenté d’appuyer un peu trop, d’autant plus que nous ne  transportons plus une bonne partie du matériel.

27. Admission dans la République

Attention, ce chapitre contient des images susceptibles de heurter la sensibilité des plus jeunes, de nuire à l’épanouissement physique, mental ou moral des moins de 12 ans.

En conséquence, veuillez activer  le contrôle parental de votre ordinateur.

Ça tombe bien, aujourd’hui nous avons tous les enfants du tournage, les soldats et les républicains, dont la petite Sarah, six ans, le jeune Bruno, à peine huit ans, Maurice, onze ans. Le spectacle qu’on leur impose est pour le moins choquant.

28. Hôpital des riches

La République des enfants - Seul

La République des enfants – Seul

Non, cet hôpital des riches n’est pas celui où nous tournons actuellement !

Il faut l’avouer, quand la régie s’occupe de vous, ça ne traine pas et je dois reconnaitre qu’ils ont été particulièrement efficaces, attentifs et dévoués !

La production a été mise au courant de mes ennuis de santé, fièvre, vertiges, ganglions à l’aine.

Je ne suis pas seul dans cet état sur le plateau, Angela, Patrick, Guilherme, Silene, il semble qu’un certain nombre d’entre-nous aient été piqués par des tiques, probablement dans le décor de la menuiserie, et que nous ayons possiblement contracté la maladie de Lyme.

Ce matin donc, à l’occasion d’un changement de plan, Yardena m’accompagne dans un bureau exigu muni d’une simple petite table et d’une chaise en métal rouillé, consulter un médecin de l’hôpital psychiatrique d’Infulene. Un premier test rapide de la malaria, on vous pique le doigt, on met la goutte de sang sur une plaquette qui réagit au bout de trente minutes, se révèle négatif. Tant mieux. Mais ce psychiatre m’avoue lui-même, par traduction interposée de Yardena, ne pas être spécialiste des soins et préfère m’envoyer consulter le service de santé de l’hôpital.

Repos complet

Maputo - Lune hivernale

Maputo - Lune hivernale

La semaine passée a été terrible, la maladie et l’ambiance du plateau ont eu raison de ma forme physique et mentale, je suis épuisé, las et guère enclin à bouger.

Aussi ce lundi, après un copieux petit-déjeuner le plus tard possible, je décide de passer la journée complète au repos dans la chambre, n’était-ce un rendez-vous en fin d’après-midi.

Une brève visite en fin de matinée à la supérette sur 24 de Julho pour faire le plein de Yop et de Fanta, quelques tablettes de Crunch, et je me replonge dans les Splendeurs et misères des courtisanes.

Plus tard dans la soirée, vers dix-huit heures j’ai rendez-vous avec Charles, l’assistant monteur de Dominique, un jeune mozambicain féru de nouvelles technologie, réalisateur à ses heures de films institutionnels. Pour Dominique, c’est lui qui se charge entre autres de la synchronisation des rushes et de toutes les manipulations informatiques. Je lui avais promis un cours sur le Cantar, enregistreur son qu’il ne connaissait pas, et le workflow de post-production qu’il vaut mieux suivre pour ne pas faire d’erreur pour la suite des opérations.

31. Confrontation et départ

Si la semaine dernière nous avons tant compté les jours dans ce décor insupportable de l’hôpital psychiatrique de Infulene, c’est que nous avions vraiment l’impression de faire du téléfilm dans un décor unique avec des scènes guère captivantes au rythme d’un long métrage qui se permet des heures d’attente interminable pas vraiment justifiées.

Compte tenu que plusieurs scènes ont été biffées du plan de travail, il nous reste à tourner ici en deux jours une unique mais longue séquence extérieure dans une cour de l’hôpital.

Celle-ci aurait bien pu être tournée n’importe où, dans un endroit calme, loin de toute circulation et en particulier de cette route EN1, car d’hôpital nous ne voyons que des murs où un panneau hospital vient rappeler que nous sommes toujours dans ce décor.

Mais voilà, on l’aura compris depuis longtemps, certains n’ont que faire du son du film et ne se rendent guère compte qu’il sera difficile de post-synchroniser des enfants, particulièrement avec un budget de post-production extrêmement réduit si ce n’est inexistant.

Nous n’étions pas venus pour cela mais nous en avons pris notre parti. A trop attendre d’un film, on est toujours déçu. Sur un plateau, les vrais bonheurs sont ceux que l’on n’attend pas particulièrement .

32. Fin de décor

Infulene - Dépôt de munitions

Infulene – Dépôt de munitions

Du haut de la passerelle qui enjambe la route EN1 face à l’hôpital où nous tournons, on aperçoit au loin une immense zone arborée non construite et totalement enclavée dans les townships.

Vue du ciel, celle-ci est encore plus mystérieuse, on y distingue des traces qui évoquent les géoglyphes de l’antique civilisation Nazca au Pérou.

C’est en fait un terrain militaire totalement bouclé et sécurisé, un ancien dépôt d’armes et munitions construit par les soviétiques en 1984 à l’époque de la guerre civile qui ensanglanta le pays de 1977 à 1992.

Le 22 mars 2007, l’ensemble du dépôt explose.

Pendant quasiment trois heures, les munitions, roquettes, bombes et armes de toutes natures illuminent le ciel de Maputo, réchauffant l’atmosphère à des kilomètres à la ronde, causant une centaine de morts et plusieurs centaines de blessés.

Hiver austral

South Africa World Cup 2010Un premier lundi d’hiver austral tropical, c’est un lundi solitaire, une matinée froide qui ne donne guère envie de sortir de sa chambre d’hôtel.

Alors que le Mozambique supporte ardemment son grand voisin africain mais aussi le Portugal, son ancien colonisateur, l’équipe de France après sa lamentable prestation d’hier est la risée de toute la région et on nous le fait bien sentir, d’autant plus que demain l’Afrique du Sud sera opposée à ces Bleus indignes et ridicules.

Il vaut donc mieux rester terré dans sa chambre et se boucher les oreilles pour ne pas entendre les vuvuzela glorifiant la victoire des lusitaniens.