38. Casa Nuta

La République des enfants - Vacances à Mafalala

La République des enfants – Vacances à Mafalala

La journée entière est prévue dans la maison Nuta.

Ça tombe bien car dehors il fait beau, pas trop chaud, juste la bonne température.

C’est une journée vraiment agréable, où l’on aurait qu’une envie, celle de s’assoir à l’ombre des arbres, tirer quelques verres de bière de la jarre dans le coin de la cour, laisser le temps passer tout seul et surtout ne pas travailler.

D’ailleurs, alors que Ernest, Camal et Paulo triment comme des fous pour tenter de désensabler le groupe électrogène, les têtes pensantes du film donnent l’exemple au reste de l’équipe, attendre et ne rien faire.

J’ai l’impression que ce groupe-là a l’air assez expert en la matière, n’est-ce pas, on dirait qu’ils sont là dans leur élément naturel.

Un de ces rares moments de grâce du plateau comme la première journée de pique-nique à Chiango, le retour à Impatuto ou encore celle de la ville morte lorsque nous avions investi la place de l’Indépendance.

Mafalala - Ford Fairlane 1957

Mafalala – Ford Fairlane 1957

Rejoindre sur les coups de dix heures Rua da Guine où se situe la maison Nuta n’a pas été très difficile depuis l’hôtel, Pierre ayant enfin pris son rôle de copilote au sérieux, il me suffit de me concentrer sur la conduite et suivre à la lettre ses indications précises. Après avoir rejoint Karl Marx, passer Edouardo Mondlane, nous tournons à gauche dans Avenida Emilia Dausse au bout de laquelle nous tombons directement sur la rue du décor.

Parking en toute sécurité au même endroit que hier, brève vérification du matériel resté sur place la nuit, le tournage ne commencera pas avant que le groupe soit sorti d’affaire. Un petit tour dans le quartier s’impose avec la voiture du cubain.

Le fils de la voisine se demande certainement ce que nous sommes venus faire ici et doit réfléchir probablement au moyen de sortir ce foutu groupe de ce foutu sable.

Mafalala - Songeur

Mafalala – Songeur

De son petit air de nous dire, «vous êtes mal barrés les gars », je comprends que j’ai tout le temps de m’enfoncer dans le dédale des ruelles. Tant qu’il y a du soleil, je ne serai pas perdu et puis j’ai un sens de l’orientation infaillible comme on l’a vu lors de notre retour de Infulene aventureux.

 
Mafalala - Ruelle

Mafalala – Ruelle

Mafalala - Ruelle

Mafalala – Ruelle

Mafalala - Ruelle

Mafalala – Ruelle

 

Le temps qui passe ne m’inquiète guère, d’une part Pierre me préviendra par téléphone lorsque viendra le moment de retourner sur le plateau, d’autre part, j’entendrai bien le groupe électrogène redémarrer. Il faudra ensuite faire la lumière, mettre en place le cadre, bref on n’est vraiment pas prêt de tourner.

Je vous l’ai dit, une journée de grâce où l’on peut flâner à contempler les arbres,

Mafalala - Papillon

Mafalala – Papillon

et profiter d’un silence bénit. Qu’est-ce que c’est bien quand on n’a plus ce bourdonnement continu dans les oreilles et qu’on peut enfin entendre les papillons voler.

La République des enfants - Paulo et Ernest

La République des enfants – Paulo et Ernest

Enfin, après quasiment deux heures de boulot, le groupe est prêt à être remorqué par un puissant tracteur venu à la rescousse. Fin de la récréation et passons aux choses sérieuses. Bon qu’est-ce qu’on tourne aujourd’hui déjà ?

La République des enfants - Casa Nuta

La République des enfants – Casa Nuta

Alors, première et avant-dernière séquence de la journée :

Nuta rentre chez elle, embrasse sa mère souffrante, endormie sur le sofa, et rejoint dans un réduit donnant sur la cour arrière sa grand-mère en plein labeur sur une machine à coudre à pédale, une véritable Singer du début XXème.

C’est la première apparition de Nuta à l’écran, nous apprenons là son intention de devenir docteur, sa grand-mère coud des vêtements pour le Palais afin de payer les médicaments indispensables à la maladie chronique de sa mère.

La vieille femme qui interprète la grand-mère n’est pas du tout actrice et c’est assez laborieux quant au texte et aux manipulations de la machine.

Heureusement l’exiguïté du lieu oblige à filmer en champ/contrechamp, pas bien larges, ce qui permettra au montage de rythmer la scène et de donner un maximum de présence à Nuta.

Nous commençons donc sur la jeune Melanie, qui vient s’adosser à l’embrasure de la porte, la grand-mère est en amorce de dos. Dans ce champ comme dans le contrechamp, la perche se place sur le in, un micro sur pied s’occupe du off ou de l’amorce.

La République des enfants – 3 / 2 t6 – perche et micro off au centre

Nous terminons cette séquence par un plan de Nuta se penchant sur le visage de sa mère allongée. Je regrette de ne pas avoir placé un couple stéréo à l’extérieur de la maison, pour l’ambiance du quartier.

La République des enfants – 3 / 1 t2 – perche et micro off au centre

Nous allons manger très tôt aujourd’hui avant d’enchaîner la seconde et dernière séquence de la journée : Chico introduit les deux filles, Bia et Fatima, dans la chambre de Nuta, c’est ici qu’elles dormiront pour la nuit.

La chambre est assez petite, juste la place de la caméra et d’un grand lit, le cadre est large je me retrouve coincé entre son bord droit et une armoire surchargée d’effets qui ne demandent qu’à tomber au moindre mouvement. La lumière au plafond n’aide pas à être précis sur les voix, par chance le texte est assez en place, la timide Anais de dos est un peu moins timbrée que Maurice. Et  il faudra insister plusieurs fois pour que Joyce ne fasse pas grincer les ressorts du lit sur le texte de sa compagne.

La République des enfants – 38 / 1 t13 – perche seule au centre

Maurice malade semble au plus mal et peine avec son texte et le maintien de son corps. Flora patient vient le pousser un peu, Pierre lui fait répéter le texte plusieurs fois en lui indiquant les endroits de césure, mais le malheureux n’en peut vraiment plus.

Un seul plan, je me demande si à la dernière prise il n’y a pas une certaine ironie de Pierre lorsqu’il demande s’il s’agit bien de la 13ème ! Record battu après les 11 prises du plan sur la cantinière dans la salle d’attente de l’hôpital de Infulene. Et il me semble bien aussi que quatre plans seulement dans la journée soit un record, de lenteur, d’autant plus qu’il s’agit de plans sur pied, quasiment fixes, sans difficulté particulière. Le rendement de l’équipe est vraiment au plus faible en cette fin de tournage.

On était si bien ce matin dans la cour à l’ombre des canisses. Ce n’est pas Ana ou Flora qui me contrediront.

La République des enfants - Angela, Ana et Flora

La République des enfants – Angela, Ana et Flora

En moins de trois quart d’heure la séquence est donc dans la boîte, la journée est pliée, il est vingt heures, nous laissons le matériel sur place et filons à l’hôtel car demain nous recommençons à l’aube.

 
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